top of page

Italie et cannabis : les jugements qui secouent le gouvernement italien

L’Italie est en pleine ébullition juridique autour de la cannabis light. Plusieurs tribunaux, c’est-à-dire non pas au niveau politique mais judiciaire, ont émis des décisions qui remettent fortement en cause le decreto sicurezza adopté par le gouvernement de Giorgia Meloni. Ces décisions déclarent que produire, vendre, ou même posséder des produits de cannabis dit light (avec faible teneur en THC) n’est pas illégal, tant que certains critères sont respectés.


🔎 Ce que disent les tribunaux

Voici les décisions clés :

  • Trento (ordonnance du 5 septembre 2025) : le tribunal affirme que produire et vendre du cannabis light est légal, parce que, à l’état actuel des données scientifiques, un THC inférieur à 0,3 % ne constitue pas un danger justifiant un interdit absolu de commercialisation. Cela valide une ligne de défense déjà adoptée dans d’autres arrêts.


  • Brescia (juin 2023) : le tribunal a acquitté quelqu’un en estimant que du cannabis light avec THC < 0,5 % « non è sostanza stupefacente » — c’est-à-dire qu’il ne s’agit pas d’une drogue au sens pénal.

  • Bari (juillet 2023) : deux entrepreneuses accusées de vente/détention ont été relaxées, le tribunal jugeant le décret gouvernemental irragionevole.

  • Rome : plusieurs sections judiciaires ont suspendu des procès, et posé la question à la Corte Costituzionale, mettant en doute la légitimité de l’article concerné du décret.


⚠️ Le décret sécurité et ses effets

Le décret sécurité (et en particulier l’article 18) du gouvernement Meloni [des ministres Piantedosi et Lollobrigida] visait à classer toutes les inflorescences (fleurs) de cannabis, quelles que soient leur teneur en THC, comme des stupéfiants. Cela revient à interdire la vente de fleurs de chanvre, même si elles sont très faibles en THC — ce qui est en contradiction avec les précédents jurisprudentiels selon lesquels ce qui compte, c’est l’effet psychotrope, c’est-à-dire le potentiel de produire un état de “high”.


🌍 Le contexte européen qui pèse lourd

  • Le droit de l’UE reconnaît déjà la légalité de la chanvre (avec un THC jusqu’à 0,3 %) via certains règlements comme le n° 1307/2013.

  • Aussi, la Commission Agriculture du Parlement européen propose un amendement de la PAC qui inclut toute la plante de chanvre (fleurs incluses) comme produit agricole, ce qui viendrait directement en contradiction avec les interdictions nationales sévères.


💼 Impacts socio-économiques

  • Le secteur en Italie pèse déjà très gros : en 2024, près de 500 millions d’euros de chiffre d’affaires, quelque 30 000 emplois.

  • Si le décret venait à être appliqué strictement (interdiction des fleurs etc.), les pertes estimées seraient énormes : environ 1,46 milliard d’euros, 22 000 emplois, et 198 millions d’euros de recettes fiscales en moins.


⚖️ Les scénarios possibles

Trois voies majeures se dessinent :

  1. Intervention de la Cour de Justice de l’Union Européenne : si les tribunaux italiens envoient une question préjudicielle, celle-ci pourrait statuer que le droit communautaire l’emporte sur les lois nationales trop contraignantes. Cela obligerait l’Italie à modifier ses règles.


  2. Corte Costituzionale : la Cour constitutionnelle italienne pourrait déclarer l’article 18 du décret anticonstitutionnel (en raison de principes comme la liberté économique, la proportionnalité de la loi pénale, etc.).


  3. Statu quo actif (“à macchia di leopardo”) : pendant quelque temps, on aura des décisions divergentes selon les tribunaux, des acquittements dans certains lieux, des interdictions dans d’autres, jusqu’à ce qu’une jurisprudence ou un texte national clair fasse office de ligne de conduite.


🔮 Pourquoi ça peut être un tournant

  • Parce que les décisions judiciaires montrent que la science compte : ce ne sont pas des textes symboliques, mais des juges qui examinent la preuve, les seuils de THC, l’effet “psychotrope” ou non.

  • Parce qu’il met en relief le conflit entre ce que fait l’État central (décret) et la jurisprudence locale, plus favorable à la légalisation de facto dans certains cas.

  • Parce que l’Europe roule dans le sens inverse du gouvernement italien : elle pousse pour une harmonisation plus permissive/raisonnable, ce qui risque de rendre l’Italie “en retard” légalement, économiquement, et politiquement.


ree

 
 
 

Commentaires


bottom of page